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Moi, ce que j'en dis...

Un chêne est retourné à la terre

1 Juin 2019 , Rédigé par Simon Rodier Publié dans #In memoriam, #En Livradois

Décidément, mon bon Jean-Noël, nous ne nous voyons plus que  pour les enterrements ... et ce n'est que de ma faute.
Avec Gaëlle et Pierre, nous ne prendrons plus nos infusions du soir ; avec nos carrures, nous devions être drôles à voir, à deviser devant notre verveine ou notre camomille.

C'est drôle, lorsque nous avons dû travailler ensemble, nous nous sommes rapidement entendus, et ce malgré nos différences :
J'avais l'âge d'être ton fils ;  ma mère me raconta - une fois - Jean-Noël MAHAULT, ce grand du lycée avec ses cheveux longs, sa prestance naturelle, ses idéaux et sa guitare.


Plus que tous les militants du parti réunis, tu croyais au communisme, tandis que moi, je reste indéfectiblement attaché aux valeurs de Sangnier, de Tocqueville et de Mounier.
Fils de nos forêts, tu avais quelque chose d'un ours, parfois bourru et taiseux, alors, que moi, je discipline si mal ma parole.

A dire vrai, quelquefois, dans le souci de bien faire, ton verbe te devança aussi. Ton côté libre-penseur, ton esprit caustique te desservirent alors.

Si nous nous entendîmes si bien, c'est parce que nous fîmes l'effort compris et, dès lors, que nous pûmes nous apprivoisés. Lors de nos échanges, tu m’insufflas ce souci du tout, de cet environnement qui constitue le biotope de l’humanité. Sans en avoir l’air, tu me fis prendre conscience de la nécessité de le préserver, de le redessiner parois, pour tenir compte des conséquences des erreurs de nos prédécesseurs.

Depuis, il m'arrive d'avoir des airs d’extraterrestre parmi nos semblables.

 

Vois-tu, je ne veux pas faire l'éloge de tes mérites, car tu refuserais surement de les admettre. Je te soupçonne d'avoir fait exprès de ne plus pouvoir entrer dans ton bel habit vert pour échapper à la remise du "poireau".
Je ne veux, même pas, faire mémoire de tes engagements puisque tous les sincères savent, avec quel dévouement, tu œuvras à l'ADACL, au Conseil municipal de Saint Germain, à la Communauté de Communes, et en tant d'autres lieux.

Tu aimais les arbres, mais tu aimais encore plus les Hommes, malgré tous leurs défauts. Tu avais cette honnête simplicité qu'ont tous les vrais humanistes, cette bienveillance qui les aveugle, ne leur permettant pas de voir venir les coups de leurs contemporains. Il n'existe pas de vertu plus honorable.

Sans doute le sentais-tu ! Evitant le verdict du lendemain, tu as choisi de partir dans la nuit, voici une semaine. Tu n’eus donc pas la déception de voir tant des nôtres s'abandonner dans l'impasse facile du renoncement, de la défiance et de la colère stérile.

Et voici, qu'aujourd'hui, je me tiens sous ce soleil de juin, parmi la foule, à écouter Marie-Noëlle et ses frères affirmer leur profession de foi, ta profession de foi.

Je suis là, avec les autres, et tout ce que tu nous as donné. Je sais désormais que l'ingratitude est le laurier le plus souvent décerné à celui qui cherche le bien commun, à celui qui tente l'avenir, à celui qui ose, malgré tout, malgré tous.


Mais ceci n'est pas le cœur de ton héritage.
Ce que tu laisses, le cadeau que tu m'as donné, comme à tous ceux qui ont bien voulu le recevoir, c'est un exemple. Après avoir cheminé quelque peu avec toi, il m'est désormais possible d'admettre l'insincérité et je te remercie de cette intransigeance salvatrice.
Le roseau ne peut que s'incliner face au corps du chêne qui l'abrita.

 

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